L'hebdo de l'actualité sociale - spécial loi 35 heures
[Retour sommaire]
Le temps de travail effectif
Article 2
I. - Le dernier alinéa de l’article L. 212-4 du Code du travail est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le temps nécessaire à la restauration ainsi que les temps consacrés aux pauses sont considérés comme du temps de travail effectif lorsque les critères définis au premier alinéa sont réunis. Même s’ils ne sont pas reconnus comme du temps de travail, ils peuvent faire l’objet d’une rémunération par voie conventionnelle ou contractuelle.
« Lorsque le port d’une tenue de travail est imposé par des dispositions législatives ou réglementaires, par des clauses conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail et que l’habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l’entreprise ou sur le lieu de travail, le temps nécessaire aux opérations d’habillage et de déshabillage fait l’objet de contreparties, soit sous forme de repos, soit financières, devant être déterminées par convention ou accord collectif ou à défaut par le contrat de travail, sans préjudice des clauses des conventions collectives, de branche, d’entreprise ou d’établissement, des usages ou des stipulations du contrat de travail assimilant ces temps d’habillage et de déshabillage à du temps de travail effectif. »

II. - Les dispositions du troisième alinéa de l’article L. 212-4 du Code du travail sont applicables à compter du début de l’année civile suivant l’abaissement de la durée légale à trente-cinq heures.

Article 3
L’article L. 212-4 du Code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Une durée équivalente à la durée légale peut être instituée dans les professions et pour des emplois déterminés comportant des périodes d’inaction soit par décret, pris après conclusion d’une convention ou d’un accord de branche, soit par décret en Conseil d’État. Ces périodes sont rémunérées conformément aux usages ou aux conventions ou accords collectifs. »

Article 4
Après l’article L. 212-4 du Code du travail, il est inséré un article L. 212-4 bis ainsi rédigé :
« Art. L. 212-4 bis. - Une période d’astreinte s’entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur, a l’obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d’être en mesure d’intervenir pour effectuer un travail au service de l’entreprise, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif.
« Ces astreintes sont mises en place par des conventions ou accords collectifs étendus ou des accords d’entreprise ou d’établissement, qui en fixent le mode d’organisation ainsi que la compensation financière ou sous forme de repos à laquelle elles donnent lieu. À défaut de conclusion d’une convention ou accord, les conditions dans lesquelles les astreintes sont organisées et les compensations financières ou en repos auxquelles elles donnent lieu sont fixées par l’employeur après information et consultation du comité d’entreprise ou, en l’absence de comité d’entreprise, des délégués du personnel s’il en existe, et après information de l’inspecteur du travail.
« La programmation individuelle des périodes d’astreinte doit être portée à la connaissance de chaque salarié concerné quinze jours à l’avance, sauf circonstances exceptionnelles et sous réserve que le salarié en soit averti au moins un jour franc à l’avance. En fin de mois, l’employeur doit remettre à chaque salarié concerné un document récapitulant le nombre d’heures d’astreinte effectuées par celui-ci au cours du mois écoulé ainsi que la compensation correspondante. Ce document, qui est tenu à la disposition des agents de contrôle de l’inspection du travail, est conservé pendant une durée d’un an. »
 
Nos commentaires
Définition légale du temps de travail effectif
Largement inspirée par la jurisprudence, la définition du temps de travail effectif retenue par la première loi sur les 35 heures du 13 juin 1998 est complétée par la nouvelle loi. Le premier alinéa de l’article L. 212-4 du Code du travail demeure : la durée du travail effectif est « le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et doit se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ». Certaines améliorations sont apportées par la nouvelle loi.

Une intégration conditionnée des pauses
Pour que le temps nécessaire à la restauration ainsi que les temps consacrés aux pauses soient considérés comme du travail effectif, il faut que les critères définis au premier alinéa de l’article L.212-4 du Code du travail soient réunis. Cela signifie que le temps de repas et les pauses « casse-croûte » sont bien du travail effectif, mais à la condition que le salarié soit à la disposition de l’employeur, qu’il doit se conformer à ses directives et qu’il ne peut vaquer librement à des occupations personnelles. Il a été jugé que tel était le cas par exemple des salariés travaillant « en continu ». Dans le cas contraire, si ces temps ne peuvent pas être reconnus comme temps de travail, ils peuvent néanmoins faire l’objet d’une rémunération par voie conventionnelle ou contractuelle.

Une intégration sélective des temps de vestiaire
Première loi
Repos quotidiens et temps de pause
La loi du 13 juin 1998 transpose les dispositions de la directive communautaire du 23 novembre 1993 relatives à la durée minimale du repos quotidien et des temps de pause.
Rappelons que désormais la durée quotidienne maximale du travail autorisée est fonction d’une durée minimale de repos. Selon l’article L. 220-1 du Code du travail, sauf dérogations résultant d’un accord collectif étendu et selon des conditions fixées par décret, aucun salarié ne peut travailler sans qu’il bénéficie d’un repos quotidien d’une durée minimale de 11 heures consécutives.
Selon l’article L. 220-2 du Code du travail, aucun salarié ne peut travailler plus de six heures consécutives, sans bénéficier d’un temps de pause d’une durée minimale de 20 minutes. Les conditions d’octroi et de rémunération de cette pause sont, en principe, déterminées par convention ou accord collectif de travail. À défaut, et en cas de litige, les juges doivent se reporter à la définition légale du temps de travail effectif pour vérifier si pendant ces pauses, le salarié est ou non à la disposition de l’employeur sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles.
Les temps nécessaires à l’habillage et au déshabillage ne sont légalement pas considérés comme du temps de travail effectif. Ils font néanmoins l’objet d’une attention particulièrement sélective de la part du législateur, comme en témoigne la rédaction du dernier alinéa de l’article L. 212-4 du Code du travail. Légalement, les temps de vestiaire ne sont pas décomptés comme du temps de travail effectif sauf accord ou usage plus favorable et, à condition bien sûr qu’un tel accord n’ait pas été dénoncé préalablement comme cela a été le cas dans plusieurs secteurs d’activité. La loi prévoit seulement des contreparties financières ou sous la forme de repos.
Il est à noter que l’application de cette mesure n’est pas d’effet immédiat puisque, curieusement, la loi précise que cette dernière disposition concernant les temps de vestiaire n’est applicable… « qu’à compter du début de l’année civile suivant l’abaissement de la durée légale du travail à 35 heures ». C’est-à-dire selon les entreprises concernées le 1er janvier 2001 ou le 1er janvier 2003.

Le maintien des heures d’équivalence
Alors qu’il en avait pourtant la possibilité, le législateur n’a pas cru bon de mettre un terme à la pratique des heures d’équivalence, ces périodes de travail gratuit appelées aussi « présence inactive » et décomptées du temps de travail effectif dans certaines industries et commerces dont la liste était en principe fixée par décret. En réalité durant ces périodes, le salarié est pourtant placé en situation de travail effectif, puisque toujours sous la subordination de son employeur. Il ne peut donc pas vaquer librement à des occupations personnelles. L’on peut donc légitimement s’interroger sur le fondement juridique d’une telle pratique.
En réalité, le fait de maintenir des temps de travail non productif tels que les heures d’équivalence hors du champ légal est en contradiction avec l’esprit de la définition du temps de travail effectif dans la mesure notamment où ces temps « non productifs » n’affectent en rien l’état de subordination du salarié par rapport à son employeur.
Il est à noter toutefois que la rédaction de cet article ne reprend heureusement pas à son compte une récente jurisprudence, plutôt restrictive de la Cour de cassation, laquelle admettait qu’un horaire d’équivalence pouvait, en outre, être mis en place directement par un accord collectif.

Les astreintes
Les astreintes font désormais l’objet d’une définition légale dont la rédaction, largement inspirée de la jurisprudence est explicite. Désormais on ne parle d’astreinte que pour les seules périodes pendant lesquelles le salarié est à la disposition de son employeur à l’extérieur de l’entreprise. C’est-à-dire que les mêmes périodes d’attentes, effectuées dans l’entreprise, ne sont plus juridiquement des astreintes mais tout simplement du temps de travail effectif.
On pouvait légitimement espérer que le législateur aille plus loin, en considérant l’astreinte, quelle que soit sa forme, comme du temps de travail effectif. En effet, par définition, lors d’une astreinte, le salarié, susceptible d’être « utilisé » par son employeur est nécessairement à sa disposition. Ne serait-ce que parce qu’il ne peut pas se soustraire à sa sollicitation, il ne peut vaquer librement à des occupations personnelles, puisqu’il est en situation d’attente.