L'hebdo de l'actualité sociale - spécial loi 35 heures
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La rémunération
Chapitre X

Rémunération

Article 32
I. - Les salariés dont la durée du travail a été réduite à trente-cinq heures ou plus à compter de l’entrée en vigueur de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998 d’orientation et d’incitation relative à la réduction du temps de travail ne peuvent percevoir, postérieurement au 1er janvier 2000, un salaire mensuel inférieur au produit du salaire minimum de croissance en vigueur à la date de la réduction par le nombre d’heures correspondant à la durée collective qui leur était applicable, dans la limite de cent soixante-neuf heures. Cette garantie est assurée par le versement d’un complément différentiel de salaire.
Le minimum applicable à chaque salarié concerné par le premier alinéa du présent article est revalorisé au 1er juillet en fonction de l’évolution de l’indice des prix à la consommation mentionné à l’article L. 141-3 du Code du travail et de la moitié de l’augmentation du pouvoir d’achat du salaire mensuel de base ouvrier enregistré par l’enquête trimestrielle du ministère de l’Emploi. Le taux de la revalorisation est fixé par arrêté.
Si la durée collective est réduite en deçà de trente-cinq heures, les salariés perçoivent au minimum le salaire mensuel tel que défini ci-dessus à due proportion de la réduction de la durée du travail en deçà de trente-cinq heures.
Les salariés à temps partiel, employés dans les entreprises où la durée collective est réduite en dessous de trente-neuf heures, et dont la durée du travail est réduite, ne peuvent percevoir un salaire inférieur au minimum défini ci-dessus calculé à due proportion.

Il. - Les salariés embauchés à temps complet postérieurement à la réduction de la durée collective de travail et occupant des emplois équivalents à ceux occupés par des salariés bénéficiant du minimum prévu au I ne peuvent percevoir une rémunération inférieure à ce minimum.
Les salariés à temps partiel embauchés postérieurement à la réduction de la durée collective bénéficient également de ce minimum calculé à due proportion dès lors qu’ils occupent un emploi équivalent, par sa nature et sa durée, à celui occupé par un salarié bénéficiant du complément différentiel.
Bénéficient également de ce complément calculé à due proportion les salariés employés à temps partiel à la date de la réduction de la durée du travail lorsqu’ils sont occupés sur un emploi équivalent, par sa nature et sa durée, à celui occupé par un salarié bénéficiant du complément, sauf si les salariés à temps partiel ont choisi de maintenir ou d’accroître leur durée du travail.

III. - Dans les cas où, en application des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 122-12 du Code du travail, les contrats de travail se poursuivent à la suite d’une modification intervenue dans la situation juridique de l’employeur, le nouvel employeur est tenu de verser aux salariés concernés le même complément différentiel de salaire que celui dont ils bénéficiaient à la date de cette modification. Le minimum applicable à chaque salarié est ensuite revalorisé dans les mêmes conditions que celles définies au deuxième alinéa du I.

IV. - Les apprentis dont la durée du travail a été réduite bénéficient de la garantie de rémunération définie au I du présent article au prorata du montant minimum du salaire fixé en application de l’article L. 117-10 du Code du travail.
Les salariés ayant conclu un contrat de qualification ou d’orientation et dont la durée du travail a été réduite bénéficient de cette même garantie au prorata du montant minimum de la rémunération fixée par décret en application des articles L. 981-3 et L. 981-8 du même Code.
Le calcul de la garantie de ressources attribuée, en vertu de l’article 32 de la loi
n° 75-534 du 30 juin 1975 d’orientation en faveur des personnes handicapées, aux personnes handicapées exerçant une activité professionnelle et fixée par rapport au salaire minimum de croissance intègre le complément différentiel de salaire prévu au I du présent article, lorsque la durée de travail de ces personnes a été réduite.
Les travailleurs handicapés employés dans les ateliers protégés ou les centres de distribution de travail à domicile visés à l’article L. 323-31 du Code du travail bénéficient, lorsque leur durée de travail a été réduite, de la garantie de rémunération définie au I du présent article au prorata du montant minimum de salaire fixé par décret en application de l’article L. 323-32 du même Code.

V. - Avant le 31 décembre 2002, le gouvernement, après consultation de la Commission nationale de la négociation collective, présentera au Parlement un rapport retraçant l’évolution des rémunérations des salariés bénéficiant de la garantie définie ci-dessus et précisant les mesures envisagées, en tant que de besoin, pour rendre cette garantie sans objet au plus tard le 1er juillet 2005 compte tenu de l’évolution du salaire mensuel de base ouvrier mentionné au I et de la progression du salaire minimum de croissance prévu à l’article L. 141-2 du Code du travail. Au vu des conclusions de ce rapport, seront arrêtées les mesures nécessaires pour qu’à cette date la garantie, devenue sans objet, cesse de produire effet.

VI. - Sous réserve des dispositions du II, lorsque les salariés dont la durée du travail a été réduite perçoivent le complément prévu au I du présent article ou un complément de même nature destiné à assurer le maintien de tout ou partie de leur rémunération en application des stipulations d’une convention ou d’un accord collectif étendu ou d’une convention ou d’un accord d’entreprise ou d’établissement, ce complément n’est pas pris en compte pour déterminer la rémunération des salariés à temps partiel telle que définie au troisième alinéa de l’article L. 212-4-5 du Code du travail, sauf stipulation contraire de l’accord collectif.

VII. - Pendant la période définie au V de l’article 5 de la présente loi et dans les entreprises visées au dernier alinéa dudit V, la rémunération mensuelle due au salarié occupé selon une durée collective de travail hebdomadaire de trente-neuf heures est calculée en multipliant la rémunération horaire par cent soixante-neuf.
Lorsque les salariés de ces entreprises sont employés selon des durées hebdomadaires de travail, collectives ou individuelles, comprises entre trente-cinq et trente-neuf heures, la rémunération mensuelle est calculée selon la même règle, à due proportion de la durée du travail.
 
Nos commentaires
Salaire minimum assuré par un complément différentiel
Le taux horaire du Smic n’est pas relevé, mais la loi garantit la rémunération des salariés qui perçoivent le Smic, ou un salaire légèrement plus élevé, par le biais d’un salaire minimum. Ce minimum est composé d’une rémunération minimale, correspondant au Smic appliqué à la nouvelle durée collective du travail, à laquelle se rajoute un complément différentiel.
Par exemple, si l’horaire collectif de travail est réduit à 35 heures, le taux horaire du Smic étant de 40,72 F depuis le 1er juillet 1999, le salaire minimum pour 169 heures est de 6 881,68 F et la rémunération minimale pour 151,67 heures ((35 h x 52) / 12) est de 6 175,87 F.
Par conséquent, le complément différentiel versé au salarié est de 6 881,68 F - 6 175,87 = 705,81 F.

Bénéficiaires du salaire minimum
Quel que soit leur effectif (plus ou moins de 20 salariés), les entreprises qui, depuis le 13 juin 1998, sont passées à une durée du travail inférieure à 39 heures, doivent impérativement appliquer le salaire minimum à compter du 1er janvier 2000. Certains salaires sont susceptibles d’être remis à niveau, sans effet rétroactif.
Si la durée du travail est réduite en deçà des 35 heures, le salaire minimum est réduit proportionnellement. Par exemple, le salarié qui travaille dans une entreprise ayant abaissé la durée du travail de 39 à 32 heures percevra une rémunération égale à environ 91,42 % du salaire minimum (32 heures étant égales à 91,42 % de 35 heures). Le salaire minimum étant garanti à hauteur de 169 heures, les salariés qui travaillaient auparavant 40 heures perdront une partie de leur rémunération correspondant à une heure de salaire plus la majoration pour heure supplémentaire, soit 441 F environ.
Le complément différentiel devra être versé aux salariés embauchés au Smic après la réduction de l’horaire dès lors qu’ils occupent des « emplois équivalents ». L’imprécision de cette formule donnera certainement lieu à des contentieux.
Les entreprises nouvellement créées ne sont pas tenues de verser aux salariés qu’elles embaucheront le complément différentiel. Elles pourront se contenter de payer le Smic sur la base de 35 heures. Mais si elles versent le Smic pour 169 heures, ces entreprises pourront bénéficier des aides de l’État.

Salariés à temps partiel
Seuls les salariés travaillant à temps partiel dans les entreprises réduisant l’horaire collectif et dont la durée du travail est réduite ont droit à un complément différentiel, calculé proportionnellement à la durée du temps partiel. Les salariés embauchés à temps partiel après la réduction auront droit au minimum proratisé à condition d’occuper des emplois équivalents à ceux des salariés bénéficiant de l’indemnité différentielle.
En revanche, la garantie de salaire ne concerne pas les salariés à temps partiel qui conservent leur ancien horaire. Cette mesure est créatrice de discrimination entre les salariés à temps partiel selon qu’ils bénéficient ou non d’une réduction du temps de travail, et entre les temps partiels non réduits et les temps plein réduits se retrouvant à travailler le même nombre d’heures.
La différence de salaire entre un salarié passant de 39 à 35 heures payées 39 heures, et un salarié à temps partiel gardant son horaire de 34 heures payées 34 heures étant très importante, pour une heure de travail en moins, le principe légal de proportionnalité de la rémunération des salariés à temps partiel par rapport à celle des salariés à temps plein n’est plus respecté. Les négociateurs ont un grand rôle à jouer pour améliorer le statut des salariés à temps partiel, défavorisés par la loi alors que leurs salaires sont déjà peu élevés et insuffisants.

Revalorisation du minimum
La loi prévoit que le minimum (c’est-à-dire le taux horaire du Smic au 1er juillet 1999
x 35 heures + le complément différentiel) sera revalorisé au 1er juillet de chaque année en fonction de l’évolution de l’indice des prix à la consommation et de la moitié de l’augmentation du pouvoir d’achat du salaire mensuel de base ouvrier. En prévoyant des modalités d’augmentation différentes de celles du Smic (le Smic bénéficie de coups de pouce et augmente en fonction des salaires horaires moyens toutes catégories confondues), elle fait en sorte que le salaire minimum progresse moins vite. Le but affiché de cette opération est de réduire progressivement l’écart existant entre le salaire minimum et la rémunération minimale (qui dépend du Smic), afin que l’un ait rattrapé l’autre en 2005, et que le complément différentiel disparaisse.